Dominique Bordes, editeur : “J’ai publie ces auteurs Afin de me sentir un peu moins seul”

Dominique Bordes, editeur : “J’ai publie ces auteurs Afin de me sentir un peu moins seul”

mayo 5, 2022 curves connect pc

Dominique Bordes, editeur : “J’ai publie ces auteurs Afin de me sentir un peu moins seul”

Ils font dix ans, il semble s’i?tre lance dans l’edition “pour sauver sa peau”. Frederick Exley, Steve Tesich. l’editeur bordelais publie minimum, mais bien, ainsi, deniche des pepites Outre-Atlantique qui font nos beaux semaines de Monsieur Toussaint Louverture.

Son nouveau bureau n’est nullement tres excellent, mais sa femme est contente : le garage d’la maison a pu etre enfin debarrasse du stock de livres qui l’encombraient.

Jusqu’a present, Dominique Bordes travaillait a domicile, chez lui, a Begles, seulement pendant son temps libre, fabriquant a l’ancienne d’excellents romans d’aujourd’hui. On nos localise facilement en librairie : Le Dernier Stade d’une soif, de Frederick Exley, Karoo, de Steve Tesich, Mailman, de J. Robert Lennon, Demande et tu recevras, de Sam Lipsyte. Plusieurs volumes races, reconnaissables a leur epaisse couverture sable ou grise et a ce curieux nom d’editeur, « Monsieur Toussaint Louverture », sans parente avec l’ancien esclave qui a conduit la revolution haitienne, a ceci pres que Notre ­plupart de ces romans portent eux aussi un vent d’insoumission. On voit dix annees, di?s qu’il a lance sa revue, devenue plus tard maison d’edition, le Bordelais aurait pu tout ­aussi bien l’appeler « Felicite Tonnerre » ou toute association de mots, pourvu que ca sonne ; en litterature, c’est tel en musique, tant que ca sonne, bien va beaucoup.

“Je suis au purgatoire. A chaque livre, bien est en mesure de s’effondrer.”

Dominique Bordes vit desormais a temps plein de sa excellente oreille. Grace a toutes les dernieres pepites qu’il a denichees outre-Atlantique – best-seller inattendu, son Karoo s’est vendu a plus de 50 000 exemplaires –, il ?uvre a le compte dans votre petit travail de Cenon, a l’est de Bordeaux, degote depuis quatre mois. Un lieu entoure de batiments sans ame, qui a pour principal merite de l’isoler du demeure du monde. Car l’homme qui se cache derriere Monsieur Toussaint Louverture travaille dur – et le fait savoir –, au point qu’on s’en souhaite limite de lui voler une apres-midi pour qu’il nous raconte De quelle fai§on on devient l’un des editeurs francais les plus en pointe en sevissant depuis la peri­pherie bordelaise, avec pour coloc’ votre loueur d’echafaudages qui ecoute au quotidien le meme disque d’Elvis…

« Je suis au purgatoire, dit-il. Ici, c’est plus ardu qu’a ­Paris. Ma maison d’edition a reussi, mais devra forcement prouver qu’elle sait faire. A chaque livre, bien pourra s’effondrer. » Crane lisse a Notre Zidane, yeux bleus lessives par nos heures de lecture, l’editeur a votre cote moine-soldat, alternant periodes d’ascese et phases de combat. L’un des anciens collaborateurs le decrit « impulsif, obsessionnel du detail, 1 maniaque qui doute de tout, mais ne laisse jamais rien au hasard ». On le devine intranquille et boulimique, avec la voracite de ceux ayant decouvert la lecture sur le tard (« C’est Stephen King qui a conduit a Faulkner »). Apres des etudes erratiques (theatre, socio, communication) et une frequentation assidue des squats d’artistes bordelais, Dominique Bordes devoile s’etre lance au sein d’ l’edition en 2004 Afin de sauver une peau, « aller de la phase ma vie ou j’etais occupe i  me detruire, de tout foutre en l’air ». Il ressemble quelquefois a toutes les personnages qu’il publie, capables de dire « nonobstant » et « encule » dans la meme phrase. Litterairement, il semble s’i?tre vite entiche des comiques ecorches et des « losers clairvoyants », qui lui ont permis d’explorer ses « propres nevroses ». Une galerie de narrateurs alcooliques et depressifs, comme ­celui de Karoo ou ceux de Frederick Exley, l’un des premiers succes maison. « J’ai publie ces auteurs Afin de me sentir un tantinet moins seul. Mes lecteurs seront venus apres coup, comme un effet collateral. » de nos jours, il parait presque gene que ca plaise autant, que des lecteurs de toute la France aient vraiment fini par lui payer sa therapie.

“Moi, je serais plutot au curves connect tantrisme editorial.”

Depuis trois ans, il voit sa cote grimper. Notre presse lui a taille une reputation de decouvreur hors pair, publiant peu et visant juste, a rebours de « l’incontinence editoriale » actuelle. « Moi, je serais plutot dans le tantrisme editorial », dit-il. Cela sort rarement environ trois titres par an, dont nombre d’Americains inconnus, a defaut de i?tre capable de surencherir sur les droits tout d’un Stephen King ou d’un Dave Eggers. Les manuscrits francais ne l’interessent nullement. « Pas assez bons. » Cela cherche la perfection ailleurs. Et detecte des documents oublies avec une technique speciale, a l’intuition – « Je ne lis rien en anglais » –, achetant ainsi des ?uvres anglo-saxonnes meconnues sans les avoir lues, juste en se fiant a votre que celui-ci percoit de leur teneur, de leur aura, a travers les remarques qu’elles ont pu susciter ici et la, chez des ecrivains ou les critiques. Il demande ensuite a votre lecteur anglophone – qu’il recrute generalement dans Facebook – de confirmer le impression en lisant le roman. Ensuite, il fera circuler l’objet a d’autres, embauche un traducteur et retravaille sans relache le texte avec une flopee de benevoles (l’ensemble de credites a J’ai fin du produit) ; ce que celui-ci appelle le « processus d’excellence » pour parvenir au post « sublime » que celui-ci semble s’i?tre imagine en achetant les droits. Pour Et quelquefois j’ai comme une grande idee, le deuxieme roman de Ken Kesey (l’auteur de Vol au-dessus tout d’un nid de coucou), le projet a commande dix annees, sollicitant une quinzaine de personnes. Mais di?s qu’il tient un roman de ce calibre, ses yeux se mettent soudain a petiller comme quand il venait d’acquerir votre pur-sang, pret a prendre l’ensemble des paris.

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